Zika le terrible ?

Craignez-vous le virus Zika? Ou plutôt: devriez-vous le craindre? Le branle-bas de combat dans les médias et dans les institutions de santé publique inquiète les citoyens et leur fait craindre le pire. Beaucoup d’informations contradictoires, mais surtout énormément d’informations incertaines.

La plus véhiculée est certainement celle stipulant que le virus entrainerait des risques de microcéphalie sur les nouveau-nés lorsque la mère aurait contracté le virus durant la gestation. Vrai ou faux?

Comme le nom le dit, les nouveau-nés souffrant de microcéphalie ont une boîte crânienne anormalement petite. La microcéphalie peut être d’origine génétique ou accidentelle. Il arrive que la femme enceinte contracte une infection durant la grossesse et que cela nuise au développement normal du cerveau et de la boîte crânienne du foetus. Le lien a été fait rapidement avec le virus Zika puisque le Brésil, lieu d’éclosion de nombreux cas d’infection à ce virus, a également été témoin d’une hausse fulgurante du nombre de bébés nés avec des malformations du cerveau et du crâne. On parle de 3 000 nouveaux-nés qui ont vu le jour en 2015 atteints d’une microcéphalie alors qu’environ 150 cas sont habituellement répertoriés. Ces chiffres sont loin d’être dérisoires. Certains de ces bébés étaient eux-même infectés par le virus Zika.

Il n’en fallait pas plus pour tirer la sonnette d’alarme et établir un lien direct entre le virus Zika et la microcéphalie. Conclusion? Femmes enceintes, abstenez-vous de visiter les pays touchés ou d’être en contact avec quelqu’un de votre entourage qui a visité ces pays. Cette mesure était nécessaire, mais quelques précisions doivent être faites face aux incertitudes publiées dans les médias ces derniers jours.

Il est indéniable qu’il y a une corrélation entre l’apparition du virus et la hausse du nombre de malformations crâniennes. Toutefois, le lien de cause à effet n’a pas encore été démontré. Deux évènements qui se produisent simultanément n’ont pas nécessairement de lien direct. Si Donald Trump remporte l’investiture républicaine et que cela coïncide une hausse incroyable de victimes frappées par la foudre, y a-t-il pour autant un lien? Il y a corrélation, certes, mais nous sommes bien loin du lien de cause à effet. Par contre, si les urgences débordent alors que le virus de la grippe éclôt, la relation est plus évidente.

L’exemple est simpliste, à la limite de l’exagération, mais il suffit à expliquer le phénomène devant lequel on se retrouve. L’usage du conditionnel est beaucoup trop rare dans les médias présentement. Les experts sont loin d’affirmer hors de tout doute que les deux évènements sont reliés et leur retenue est de mise. Les autorités de santé publique devraient aussi se pencher sur les autres propriétés qui auraient pu mener à une telle explosion des cas de microcéphalie.

Toutefois, il semble que les « preuves circonstancielles sont quand même importantes » quant au virus Zika, a souligné Guy Boivin, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les virus en émergence et la résistance aux antiviraux et infectiologue, au journal Le Fil de l’Université Laval. Effectivement, le principe de précaution s’imposait ici. Il ne fallait pas attendre d’avoir les résultats des études menées sur le sujet avant de mettre en place des mesures, car ceux-ci risquent de se faire attendre plusieurs mois, règles de la science obligent. Même que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) considère le virus Zika comme une urgence mondiale.

En attendant, les femmes enceintes craignent le pire. Le stress de la maternité est déjà assez suffocant. Je crois que ces futures mères n’ont pas besoin de ces craintes. Même si des cas ont été répertoriés de voyageurs ayant visité les pays touchés au Québec, je crois que des recommandations simples sont encore de mise. Il y a une urgence d’agir pour le bien de la santé publique, certes, mais la panique actuelle peut sembler exagérée devant le peu d’informations et de certitudes que nous possédons actuellement.